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Escalade
Escalade : Alberto Ginés López, des rochers d’Estrémadure à l'or olympique
L’athlète espagnol s’est fait un nom grâce à ses bons résultats lors des plus gros évènements au monde, du Dual Ascent aux Jeux olympiques. Ce n’est que le début. Voici comment il en est arrivé là.
À l'époque, il n’avait que 18 ans. Aux Jeux de Tokyo, en 2020, Alberto Ginés López a surpris tout le monde en remportant la première médaille d’or de l’histoire de l’escalade (en combiné). Il est arrivé, s’est frotté aux professionnels, aux vétérans, a réussi à se tisser l’étiquette d’outsider potentiel, et finalement de champion olympique.
López a ensuite dû faire face à une avalanche de commentaires désobligeants, certains osant émettre l’idée que sa victoire était une histoire de chance. On est pourtant loin d’un scénario à la Steven Bradbury, mais sa détermination, son éthique de travail et ses performances sur le long terme sont une cohorte d’arguments prouvant l'exact opposé : c’est un champion en bonne et due forme.
Aujourd’hui, Alberto peut fièrement arborer ses deux médailles obtenues en Coupe du monde (argent et bronze). Il a aussi participé au Red Bull Dual Ascent en 2022 et sera présent du 1er au 4 novembre à Verzasca (Suisse) pour l’édition 2023. Mais l’Espagnol n’est pas rassasié pour autant, il a les Jeux de 2024 dans le viseur.
36 minutes
Red Bull Dual Ascent
Regardez 16 athlètes de classe mondiale s'affrontent pour franchir le plus rapidement possible le barrage de Verzasca.
Pour atteindre ses objectifs et comprendre ses motivations, il faut revenir en arrière et analyser le parcours du jeune champion.
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Les débuts
Pendant son enfance, le père d’Alberto, grand fan d’escalade, l’emmène chaque weekend avec lui : « Au lieu des commentaires typiques des parents comme “descends, tu vas te faire mal”, il avait plutôt tendance à dire “mets de vraies chaussures d’escalade et tu arriveras à passer cette partie”. C’est comme ça que j’ai commencé. L’escalade, pour ma sœur et moi, c’était un jeu ».
Chaque jour il y a un nouveau défi, un nouveau mystère à résoudre
La famille Ginés López, vivant à Cáceres, à l’ouest de l’Espagne, a toujours préféré l’escalade aux sorties à la plage. C’est ce qui a transformé l’étincelle d’intérêt du jeune Alberto en passion ardente. « C’est un défi constant, c’est ce qui est génial avec l’escalade : chaque jour, vous faites face à un nouveau challenge. J’ai toujours aimé les puzzles, les énigmes, toutes ces choses. Et l’escalade c’est un peu ça. Chaque jour il y a un nouveau défi, un nouveau mystère à résoudre ».
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Trouver sa voie
Dès ses trois ans, Ginés López a commencé à accompagner les amis de son père dans leurs sorties. Sept ans plus tard, coach David Macia est entré dans sa vie.
À cette époque, Alberto hésitait entre la gymnastique et l’escalade, mais grâce aux entraînements de David Macia, il est vite devenu un excellent grimpeur : « Mes amis m’ont enseigné l’escalade, mais David m’a appris à bien grimper, à m'entraîner, à gérer les compétitions. Il m’a tout transmis ou presque ».
Je n’ai jamais eu le sentiment d'être le meilleur, je cherchais simplement à m’améliorer et à progresser un peu…
C’est à ce moment-là que Ginés López a pris la décision d’arrêter la gymnastique pour se concentrer pleinement sur l’escalade, même s’il se considérait alors comme un grimpeur moyen : « Je n’ai jamais eu le sentiment d'être le meilleur, je cherchais simplement à m’améliorer et à progresser un peu… »
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Sur la route des sommets
La ville natale d’Alberto étant l’équivalent d’un désert pour les aficionados de l’escalade, chaque weekend, il devait prendre la voiture avec son père pour chercher des rochers et voies à la hauteur de son talent et de sa soif de défis. Au départ, ils ont opté pour les rochers escarpés à l’ouest de l’Estrémadure, non loin de la frontière portugaise, à trois heures de route.
Assez vite, le père et son fils tournent leur regard vers les Pyrénées : « On partait le vendredi, quand mon père sortait du travail et moi du collège, on mettait cinq heures pour arriver à Burgos, on dormait là-bas et le lendemain matin on partait pour la frontière française. On s'entraînait le samedi et le dimanche matin avant de repartir pour Cáceres, puisque le lendemain j’avais collège et lui devait retourner travailler ».
Sa famille était très occupée : son père travaillait dans le bâtiment à temps complet et sa mère était infirmière. Sa réussite sportive n’est pas le fruit de privilèges ou d’un quelconque avantage financier, elle est due à sa passion et au soutien de ses parents.
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Une voie en dévers
Rien n’a été simple pour Alberto : « Les premiers championnats, ça ne s’est pas bien passé, je ne montais même pas sur les podiums. Ce n’est pas comme si j’avais commencé en gagnant toutes les compétitions… J’étais très stressé, c’était horrible, notamment les épreuves internationales ».
Au cours d’une de ses premières compétitions de la saison 2014-2015, après deux chutes sur les premières voies et de mauvais résultats, les larmes coulent : « C’était atroce, un désastre ».
Mais, malgré des débuts compliqués, Alberto n’a pas jeté l’éponge pour autant. Il a continué à participer aux championnats et les médailles ont fini par arriver.
En 2017, aux Championnats du Monde IFSC puis aux championnats d’Europe jeunes en catégorie B, il monte sur le podium. Un an plus tard, il parvient à se classer à la septième place pour sa toute première apparition sur un évènement de la Coupe du monde. C’est seulement le troisième grimpeur à réussir cet exploit.
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La famille, les amis et les tattoos
Ginés López n’est pas seulement proche de ses parents et de sa sœur, ses grands-parents sont également très importants pour lui. Pour célébrer sa victoire, sa grand-mère s’est même faite tatouer les anneaux olympiques sur l’avant-bras.
« J’adore ma famille, je m’appuie énormément sur eux, et sur mes amis qui sont ma deuxième famille ». Les amis de son père, ceux avec qui il grimpait quand il était tout petit, font encore partie de ses meilleurs amis. Même s’il habite désormais à Barcelone et a choisi la vie d’athlète professionnel, il leur parle régulièrement.
Comme sa grand-mère, il a quelques tatouages : un smiley souriant sur la jambe, Naruto et Jiraya (en référence à son animé préféré) et l’inscription « sic, paris magna », une phrase en latin qui signifie « la grandeur vient des débuts modestes ».
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Quand je me suis qualifié pour la finale, j’ai fondu en larmes.
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La gloire inattendue
Après une série de victoires, Alberto a obtenu le précieux sésame : la qualification aux jeux de Tokyo. Pour lui et son coach, la stratégie était simple : « Vitesse et bon classement = médaille ». Malgré les problèmes liés à la pandémie et notamment la complexité pour trouver un endroit où s’entraîner, il a réussi à récolter la toute première médaille d’or d’escalade.
« Quand je me suis qualifié pour la finale, j’ai fondu en larmes. J’avais accompli un objectif que je m’étais fixé il y a trois ou quatre ans, pour certains, ça prend beaucoup plus de temps. Mais pour moi, à mon âge, ça représente déjà un gros pourcentage d’années ! »
« Je suis arrivé en finale et je l’ai gagnée comme ça. Je ne m’y attendais absolument pas, j’avais du mal à y croire, David non plus, on n’a pas du tout eu de réaction ».
Gines Lopez est sorti de l’ombre, a explosé toutes les attentes, mais l'anxiété a rapidement pris le dessus : « Il y a eu un gros moment de flottement pendant quelques mois. Qu’est-ce que je fais maintenant ? Comment je fais pour me reconcentrer sur ma vie si j’ai déjà accompli l’objectif suivant ? » Après quelques séances de thérapie, il a repris sa marche en avant.
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Le futur
Alberto n’est pas le genre de personne à tout planifier des mois à l’avance, mais il sait où il va : « J’ai quelques petits et gros projets, comme me préparer pour les jeux, mais je n’ai rien d’énorme en tête. Je n’aime pas trop m'organiser des mois à l’avance, parce que si ça tombe à l’eau, je vais être déçu. Je m’occupe du quotidien ».
Il a quand même quelques objectifs en tête, comme un diplôme en physiothérapie et l’apprentissage de l’anglais. Il espère aussi construire une académie d’escalade pour les plus jeunes dans le futur.
Sa devise aujourd’hui ? « Y aller, et participer comme si le résultat n’avait pas d’importance et s’amuser ». Avec sa passion et sa détermination, Gines Lopez espère remporter les plus grosses compétitions, une prise et surtout une médaille à la fois.
Pour suivre Alberto Gines Lopez dans son ascension du barrage de Verzasca pendant le Dual Ascent, du 1er au 4 novembre, c’est ici.
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