Pour beaucoup, imaginer Justine Dupont loin de l’océan relève quasiment de l’impossible. Il faut dire que la surfeuse nous habitue à la voir dompter les vagues les plus impressionnantes du globe depuis maintenant plus d’une décennie, elle qui s’est imposée comme l’une des meilleures waterwomen de la planète.
Pourtant, rien ne prédestinait la Bordelaise à devenir multiple championne du monde des WSL XXL Awards, championne du monde de SUP, ou encore vice-championne du monde dans trois disciplines différentes. Bref, de devenir la surfeuse la plus polyvalente du circuit. Du moins, presque rien.
Découvrez le documentaire À la folie et revivez la saison 2020 de Justine comme si vous y étiez
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À la folie
Préparez-vous pour un voyage au cœur des plus grosses vagues du monde avec Justine Dupont dans le film "À la folie".
Premières vagues
« J’ai commencé à surfer à Lacanau à l’âge de 11 ans en famille », raconte-t-elle. J’ai commencé par le skimboard et le bodyboard avant de me mettre au surf avec la planche de mon frère que j’ai ensuite récupérée. Bref, c’est une vraie histoire de famille. »
Si la jeune Justine attrape vite le virus de la vague, donc, elle est encore loin d’imaginer qu’elle consacrera sa vie à cette discipline. « Au début, je voyais vraiment ça comme un loisir plutôt qu’un sport avec une autre intention que de m’amuser. Je faisais déjà de l’athlétisme et de la natation en compétition et j’étais beaucoup plus assidue là-dessus. »
Ce qu’elle aime par dessus tout (et encore aujourd’hui), c’est « l’esprit de liberté. Être en famille, dans la nature, passer mes journées dans l’eau avec mes amis, ressentir les sensations que le surf procurait. Pour moi, il n’y avait aucun cadre ou aucune règle dans le surf. On s’amusait, tout simplement », explique-t-elle.
Animée par cet esprit de liberté, Justine Dupont surfe plus régulièrement. Elle s’inscrit d’abord dans un club avant de suivre un cursus de sport-étude au lycée, à Bayonne. Une façon pour elle de pouvoir surfer en semaine. « On habitait dans la banlieue de Bordeaux, ça faisait loin pour aller à l’océan, donc on y allait que les week-ends ou pendant les vacances », se souvient-elle.
Je faisais des interviews en anglais alors que je ne parlais même pas la langue, j’ai été immergée d’un coup dans le monde du surf professionnel.
C’est à cette période qu’elle intègre le pôle France de surf et qu’elle commence à envisager l’aspect compétitif de la discipline. Justine Dupont a alors 15 ans et les choses sérieuses commencent.
Comme un poisson dans l'eau
En 2008, elle remporte son premier titre de championne d’Europe WSL. L’année suivante, elle termine 3ème aux championnats du monde de longboard et renouvelle cet exploit en 2010, année durant laquelle elle réalise un doublé aux championnats de France en raflant les titres dans les deux catégories surf et longboard.
« À ce moment-là, j’ai peut-être eu une sorte de déclic pour envisager quelque chose de sérieux, » explique-elle. « Je faisais des interviews en anglais alors que je ne parlais même pas la langue, j’ai été immergée d’un coup dans le monde du surf professionnel. »
En 2011, c’est la consécration. Pour sa première année sur le circuit professionnel, elle obtient sa qualification parmi l’élite mondiale du surf féminin, le WCT.
Comment expliquer de telles performances ? « Par le temps passé dans l’eau », répond Justine. « Je rentrais dans l’eau le matin et j’en sortais le soir, j’étais dans mon élément naturel. Ma combinaison, c’était mon habit de la journée. Mon grand frère surfait lui aussi et avait cet engouement pour la discipline, tout comme mon père, qui faisait du longboard. »
C’est d’ailleurs en empruntant les planches de son père que Justine découvre le longboard. « J’avais tendance à préférer le côté radical du longboard, ça m’apportait quelque chose de différent. Dans le surf, j’ai toujours été assez polyvalente, parce que je trouvais intéressant d’appréhender la vague de plusieurs façons, ça te donne une vision et des sensations différentes, et ça te permet aussi de l’apporter à une autre discipline, je pense que ça se ressentait dans ma manière de surfer. »
C'est l'océan qui dicte mon calendrier
Toujours plus gros
Ce besoin de nouveauté explique en partie pourquoi Justine Dupont s’intéresse à quelque chose qui va radicalement changer sa vie : le surf de gros. « Lorsque je m’en suis rapprochée, il y avait un esprit retour aux sources qui me plaisait beaucoup. Je ne pourrais pas dire que je m’étais perdue dans la compétition, mais en tout cas, je m’étais éloignée du surf que j’aimais avec », explique-t-elle. « J’adore la compétition, mais c’est de l’esprit du surf d’aventure dont je suis tombée amoureuse. Celui où tu pars surfer pendant des heures, tu ne sais pas ce qu’il va se passer et tu en apprends énormément sur toi. »
En 2012, elle s’illustre d’abord sur le spot d’Aileens en surfant, à l’époque, un tube considéré comme le plus gros jamais ridé par une femme. L’année suivante, elle continue sur sa lancée et surfe pour la première fois le spot de Belharra, au large de Saint-Jean-de-Luz, où elle bat ce record avec une vague estimée à 15 mètres.
« Surfer la plus grosse vague n’a jamais été un objectif », se justifie-t-elle pourtant. « Mais en vivant à Nazaré (au Portugal ndlr.) on se fait forcément happer par la taille des vagues. Les médias, les équipes t’en parlent, tout le monde veut connaître les dimensions en question. À Belharra, il n’y avait pas encore cette notion. »
Le 13 novembre 2019, c’est l’apothéose. Tractée par un jet-ski, Justine Dupont surfe un monstre de plus de 20 mètres à Nazaré. « C’est comme si je volais », nous raconte-t-elle alors peu de temps après cet exploit, « le sentiment d’avoir quelque chose d’énorme dans mon dos, c’était hyper étrange. C’était la plus belle vague de ma vie, je suis super heureuse d’avoir fait ça. »
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L'énorme vague de Justine Dupont à Nazaré
La surfeuse de gros Justine Dupont a repoussé ses limites en surfant la plus grosse vague de sa vie à Nazaré en novembre 2019. C'est peut-être la plus grande vague de l'histoire pour une femme.
Mais comment expliquer cette quête du « toujours plus gros » ? « Ce serait malhonnête de me dire que je ne suis pas en quête d’adrénaline, mais ce n’est pas ce que je recherche le plus », répond-elle. « Ce qui m’attire, c’est savoir ce dont je suis capable, apprendre de mon potentiel pour pouvoir le développer et comprendre plein de dynamiques : comment fonctionner en équipe, savoir gérer le risque et de la peur. Énormément de paramètres sont passionnants dans le surf et c’est ce pourquoi je vis. »
Cette vie consacrée au surf, Justine la paie à sa façon : "Évidemment, il y a eu des côtés négatifs, je n’ai pas pu assister à tous les rendez-vous familiaux, je ne suis pas allée au mariage de mon frère… Je ne peux pas prévoir grand chose puisque c’est l’océan qui dicte mon calendrier et je ne peux pas connaître la date exacte où une énorme vague se présentera. Ce n’est pas toujours compris, et c’est parfois mal vu, mais ça fait partie de la beauté de cette discipline et de mon métier. C’est une liberté folle. Il y a un aspect positif et négatif dans chaque chose et je me considère aujourd’hui comme très chanceuse." Chose que l’on peut constater dans le dernier documentaire à voir sur Red Bull TV à partir du 8 avril 2022 : À la Folie.
Un hiver de folie
En octobre 2020, alors que le monde se confine, Justine Dupont et l’élite du surf de gros se donnent rendez-vous sur le spot de Praia do Norte pour inaugurer la saison des grosses vagues. Justine Dupont ne le sait pas encore, mais elle s’apprête à vivre « le plus bel hiver de [sa] carrière. » Après le Portugal, direction Mavericks, en Californie, Jaws, à Hawai, là où le 16 janvier 2021, Justine Dupont surfe une vague qui lui vaudra le prix du « Ride de l’année » lors des Big Wave Awards. « Le surf, c’est l’équilibre et là, j’étais dans un équilibre parfait », se raconte-t-elle.
Quand on lui demande quels sont ses prochains objectifs, Justine Dupont répond du tac au tac : « Revivre ces émotions. » Celles que seul l'océan peut offrir.
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