Le pilote de F1 japonais peut légitimement prétendre au rôle de leader de la Scuderia AlphaTauri lors de la saison 2023 du championnat du monde.
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F1

La transformation de Yuki Tsunoda

En repensant sa méthode de travail, le crack japonais a amélioré ses performances en piste et peut légitimement prétendre au rôle de leader de la Scuderia AlphaTauri cette saison.
Écrit par Etienne Caillebotte
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À Faenza, la question de la hiérarchie, qui était actée et acceptée par toutes les parties, ne se posait plus depuis deux ans. Mais Pierre Gasly a quitté le navire à l'intersaison et plongé son ex-employeur dans le flou de la succession. En retrouvant son coup de volant dans l'environnement qui l'a révélé après une pige imparfaite à Milton Keynes, le Normand a écrit l'une des plus belles pages de l'histoire de la Scuderia AlphaTauri en remportant le Grand Prix d'Italie. Puis il s'est logiquement imposé, week-end après week-end, comme son leader charismatique et principal pourvoyeur de points au classement constructeur (133 points sur 177 marqués depuis 2021).
En affichant une telle régularité et en se sublimant parfois, le Français a aussi offert du répit à son équipier Yuki Tsunoda, rapidement promu en F1 mais inconstant, malgré un premier Grand Prix prometteur. Conservé cette saison et désormais associé à Nyck de Vries, virevoltante « guest star » du Grand Prix d'Italie et élève studieux dans les catégories inférieures, le Japonais n'a plus le choix. Il doit confirmer et justifier la confiance que lui accorde son directeur d'écurie Franz Tost qui, lors du renouvellement de son contrat, arguait encore : « Yuki est un pilote très talentueux et a beaucoup progressé cette saison. Un pilote a besoin d'au moins trois ans pour se familiariser pleinement avec la Formule 1 ». L'année écoulée, bien que décevante sur le plan comptable avec une 17e place au classement pilote, a tendance à lui donner raison.

La fièvre du samedi après-midi

Le pilote japonais de Formule 1 Yuki Tsunoda pose avec le pilote néerlandais Nyck de Vries lors de la présentation 2023 de la Scuderia AlphaTauri.

L'année de la maturité pour Yuki Tsunoda ?

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Car l'Autrichien a mesuré les progrès réalisés par son poulain en qualifications. Il sait à quel point l'exercice constitue un indice fiable pour jauger l'évolution d'un pilote, notamment dans le duel qui l'oppose à son équipier. Sévèrement battu par Pierre Gasly en 2021, n'évitant la correctionnelle que lors de l'ultime manche, Yuki Tsunoda a changé de braquet en 2022. Le bilan, bien plus satisfaisant (13-9 à l'avantage du Français), s'explique par une étude méticuleuse des circuits qu'il connaissait peu lors de son arrivée en F1, mais pas seulement. « L'an dernier, à la même période, je n'avais pas totalement le contrôle, explique-t-il dans les colonnes de Motorsport.com. Je ne savais pas ce que je faisais. Et à chaque tour, je poussais jusqu'à la limite, et c'est comme ça que les [accidents] arrivaient. Après ça, j'ai traversé une mauvaise période, mais c'était aussi un bon apprentissage en tant que pilote ».
Ce besoin d'atteindre les limites de la monoplace à chaque virage, qu'importe l'enjeu, il l'a développé lors de son passage éclair dans l'antichambre en 2020. Un peu par nécessité, avoue-t-il. « J'avais la même approche qu'en F2, qui a un format complètement différent avec une séance d'essais directement suivie par les qualifications. J'essayais toujours de tout réussir, d'attaquer dès la première séance d'essais et, en F1, c'est difficile de faire ça ». L'an dernier, le Japonais a appris à canaliser son enthousiasme pour éviter des sorties de piste, comme lors de la Q1 au Castellet et à Imola. « Je lui ai dit que cela n'avait pas de sens de toujours pousser en Q1 et de risquer l'accident quand on a une voiture capable d'aller en Q3, rappelle Helmut Marko. Quel est l'intérêt ? Il suffit de passer en Q2, il n'a pas besoin d'être le plus rapide à chaque séance ».

Changement d'ambiance

L'année dernière, le pilote F1 AlphaTauri Yuki Tsunoda a appris à canaliser son enthousiasme pour éviter des sorties de piste regrettables, comme lors de la Q1 des Grand Prix du Castellet et à Imola.

Yuki Tsunoda est devenu plus régulier et compétitif en 2022

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Mais pour retrouver de la sérénité et se plier aux exigences de la catégorie reine, le Nippon devait aussi évoluer sur le plan personnel. Désormais installé à quelques kilomètres de l'usine de Faenza, il est suivi par un préparateur qui contrôle son alimentation et sa forme physique. Il partage ses journées entre séances de sport et réunions techniques avec les ingénieurs, bien loin du triptyque « Uber Eats, PlayStation, dodo » qu'il revendiquait en blaguant au début de sa carrière, quand sa confiance semblait encore inébranlable. Également suivi par un psychologue pour canaliser sa fougue, notamment verbale, le pilote de poche (1m59) mesurait les bénéfices de la démarche au bout de quelques semaines : « À la radio... peut-être que je crie encore, mais je n'appuie plus sur le [bouton] ».
Après 43 départs en Grand Prix, Yuki Tsunoda est à un moment charnière de sa carrière et sera attendu au tournant par ceux qui ont cru en lui, à commencer par Franz Tost et Helmut Marko. « Cette année, comme je m'attends à ce que nous ayons une voiture assez compétitive, Yuki doit toujours viser la Q3 et terminer les courses dans les points » prévient l'Autrichien, qui refuse d'établir une hiérarchie entre ses pilotes. La troisième année sera-t-elle la bonne, comme le pense le patron ? Une chose est sûre : le pilote de 22 ans n'est jamais aussi performant que lorsqu'il se retrouve dos au mur. En 2020, Helmut Marko lui avait promis un baquet en F1 en échange d'un top 3 lors de sa première année en Formule 2. Quelques mois plus tard, il alignait l'AT02 sur la grille de départ.

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